16.01.2016
Au commencement, il y a le geste. Répété inlassablement, il raisonne selon la logique propre des matériaux qu’il rencontre. Le processus dans l’œuvre de Tatiana Wolska est construit comme une partition de musique de chambre pour trio, dans laquelle chaque soliste travaille avec les autres à construire une harmonie.
Une artiste représentée par la Galerie Catherine Issert, située dans le superbe village de Saint-Paul de Vence (06570), 2 route des Serres.
Le meneur de cette composition est toujours la main, les autres instruments sont tour à tour la feuille et le stylo / le bois et la vis / le plastique et le fer à souder… Pour résultat, une pratique protéiforme, dans laquelle dessins et sculptures dialoguent et créent un univers atypique rempli de formes mutantes, de paysages, ou de toute autre figure que l’artiste et le spectateur voudront invoquer. On y retrouve toujours une simplicité dans le geste choisi (tracer une ligne, souffler sur de l’encre, assembler, compacter) ainsi qu’une économie de moyens dans le choix des matériaux. Tatiana Wolska recycle principalement des rebus : bouteilles de plastique vides, chutes de bois et de mousse, vieux clous, mobilier abandonné…. Née en 1977 en Pologne, elle explique ce choix non pas par souci écologique, mais par des habitudes prises durant son enfance, époque à laquelle le « système D » et la récupération étaient les mots d’ordre de sa survie. Tatiana Wolska passe un temps long et patient à construire ses œuvres : ses gestes sont précis, méticuleux et nombreux.
Exposition « Les Modules » – Fondation Pierre Bergé & Yves Saint Laurent – Palais de Tokyo, Paris – 2014 :
Sculpture de 2012 – Bouteilles en plastiques thermosoudées 90x250x215 cm © Karolina Kadlubaj, Courtesy Galerie Catherine Issert.
Clous Perdus 2014 © Karolina Kadlubaj, Courtesy Galerie Catherine Issert.
Galerie Catherine Issert, Saint-Paul – 2013
Porte-sculpture – chutes de bois, colle, vis, 230/470/440 cm © Karolina Kadlubaj, Courtesy Galerie Catherine Issert.
L’histoire de l’art est ici, au même titre que la littérature ou la musique, une part de la toile de fond sur laquelle s’inscrit la pratique de l’artiste. Ce ne sont pas ses dimensions théoriques et/ou conceptuelles qui sont ici au centre du propos mais plutôt ses qualités philosophiques et ontologiques ; car Tatiana Wolska est un artiste du faire, du sensible. Dans sa pratique, le concept naît de la forme et non l’inverse : c’est l’agencement des matériaux qui donnent naissance à la pièce qui fera peut-être œuvre. En rejetant le concept comme ordre premier de la création, Tatiana Wolska se place en faux par rapport à certaines postures contemporaines : ici l’homo faber, l’homme qui fabrique, et l’homo ludens, l’homme qui joue, retrouvent leurs droits. Le minimalisme et le white cube sont également remis en cause : la forme industrielle est ici façonnée, transformée et porte la trace d’un travail manuel ; certaines œuvres parasitent l’espace et contrarient sa structure. L’exemple le plus frappant est une de ses plus récentes créations, Porte-Sculpture (2012/2013) : sorte d’igloo / tanière, elle accueille divers œuvres en son sein et les transpose dans un univers organique, utérin. Une manière de refuser le diktat de la monstration contemporaine, puisqu’elle « impose » au spectateur l’intimité de la pratique au lieu del’« exposer » dans l’espace neutre et blanc de la salle d’exposition. janvier 2013′
Vue de l’installation « Principe d’incertitude », Palais de Tokyo, Paris 2015 – © Courtesy Galerie Catherine Issert.
La Veilleuse 2014 270x125x170 cm – © Tatiana Wolska, Courtesy Galerie Catherine Issert.
Dessin 2015 150×150 cm © Courtesy Galerie Catherine Issert.