"Dream Aside" - Bram Kinsbergen
- PACT -

Bram Kinsbergen « Dream Aside »

PACT : 11 mai – 22 juin 2024

Pour l’exposition « Dream Aside », Bram Kinsbergen est parti de peintures qu’il avait réalisées auparavant. Il a gratté certaines parties de la peinture avec une spatule affûtée ou une ponceuse. Le résultat était fondamentalement imprévisible : parfois seule une partie de la peinture était retirée, parfois trop de peinture était grattée, et parfois la toile entière se déchirait. Le résultat final de cette expérience marquait un nouveau départ pour Kinsbergen. Sur ce qui restait de ces oeuvres plus anciennes, des paysages tranquilles ont alors commencé à apparaître : principalement des ciels sombres, des lacs calmes reflétant l’éclat luminescent de la pleine lune, un réseau dense de rivières et de forêts. Les figures humaines dans l’oeuvre de Kinsbergen sont généralement seules, presque totalement intégrées dans le paysage. Parfois, nous ne voyons que des traces d’activité humaine : un canoë ou un 4×4 qui a pénétré profondément dans la nature sauvage mais qui est maintenant en danger d’être submergé. L’imprévisibilité du processus a non seulement permis à Kinsbergen de transformer et de remodeler son propre travail, mais elle touche également à une question qui lui est essentielle : est-il possible de redécouvrir le monde ?

De nos jours, faire face à l’inconnu semble impossible. Nous vivons dans un monde où même les forêts les plus reculées et les rivières les plus inaccessibles ont été minutieusement cartographiées, photographiées et exploitées. Tout cela est étroitement lié à l’histoire sombre du colonialisme : motivé par le contrôle et la cupidité, il a souvent abouti à l’épuisement et à la destruction de la nature. L’intérêt de Kinsbergen pour la redécouverte du monde n’est en aucun cas une tentative de réitérer cette histoire. Au contraire, c’est le désir de rompre avec ce schéma. Cela commence par renoncer au contrôle et par embrasser l’imprévisibilité comme un aspect fondamental de notre relation au monde. En outre, Kinsbergen cherche à développer une imagerie de la nature qui rompt avec les représentations que nous trouvons sur les réseaux sociaux ou dans la tradition romantique. Contrairement à la tradition romantique, Kinsbergen ne met pas en contraste un observateur détaché avec un paysage naturel sauvage et débordant; et contrairement aux clichés glamour de la nature que nous voyons partout sur les réseaux sociaux, Kinsbergen délaisse les représentations éclatantes de paradis ensoleillés. Ses oeuvres dépeignent généralement un environnement naturel désolé où une figure solitaire est pleinement immergée. Elles ne tentent pas de contrôler le monde dans lequel elles se trouvent, mais elles interagissent avec lui; elles en font véritablement partie. Un smartphone n’est jamais loin, il y a toujours le risque de transformer à nouveau le monde en une image. Mais dans la plupart des oeuvres de Kinsbergen, les figures n’ont pas encore succombé à ces technologies.

En tant que partie finale de la tentative de Kinsbergen d’établir un nouveau contact avec le monde, ces figures solitaires dans son travail méritent notre attention. Au premier regard, elles semblent n’être que de simples contours esquissés. Elles sont semi-transparentes, le monde transparaît à travers elles et leurs visages sont délibérément sous-définis. En fait, c’est le but. Le soi, suggère Kinsbergen, n’est guère plus qu’un contour flou qui est imprégné et façonné par le monde qui l’entoure. Cela représente déjà un pas crucial loin de l’état d’esprit individualiste qui a conduit à la fois à la découverte coloniale et à notre représentation sur les réseaux sociaux. Mais il y a plus. Au sein des contours des figures dans l’oeuvre de Kinsbergen, nous pouvons parfois découvrir un paysage différent ou un monde différent. Totalement immergées dans leur environnement, ces figures sont également des passerelles vers différentes réalités – le monde intérieur de l’esprit.

Plusieurs mondes se déplacent à travers ces figures, s’entrelaçant. De cette manière, Kinsbergen crée une compréhension riche et stratifiée du monde, suggérant la possibilité d’une manière différente de s’engager avec notre monde, une redécouverte même.

– Bram Ieven

– PACT –

 

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